L’univers de la décoration et de l’aménagement d’intérieur attendait cette décision avec impatience… la justice a enfin tranché !
Souvenez-vous, en 2013, Maisons du Monde reprochait à Auchan d’avoir commercialisé des tasses et des bols « vintage », qui évoquaient un tableau qu’elle distribuait elle-même dans ses magasins, dénommé « Pub 50’s ». Estimant être copiée, Maisons du Monde a alors introduit une action en justice contre Auchan, sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme.
La chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 26 juin 2024 (n°23-13.535), apporte des précisions intéressantes sur la preuve du parasitisme économique.
1. La définition du parasitisme économique
A titre liminaire, il convient de rappeler que le parasitisme consiste pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre, afin de tirer indûment profit de ses efforts, de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis, sans en assumer les coûts ou risques.
Cette action ne doit pas être confondue avec la contrefaçon qui sanctionne une reproduction, imitation ou utilisation d’un droit de propriété intellectuelle sans l’autorisation de son propriétaire.
2. Les conditions du parasitisme économique
Selon la jurisprudence en vigueur, Maisons du Monde devait donc réunir trois critères cumulatifs pour obtenir la condamnation d’Auchan sur le fondement du parasitisme :
– L’existence d’une valeur économique individualisée et identifiée ;
– La volonté de se placer dans le sillage d’un concurrent par la commercialisation d’un produit identique et/ou fortement inspiré de l’apparence du premier produit ;
– L’absence de contrepartie ou de prise de risque du parasite.
Maisons du Monde soutenait que la société Auchan avait tiré indûment profit des efforts de conception et des investissements consacrés à la création de la toile « Pub 50’s » et qu’à ce titre, le parasitisme économique était caractérisé.
Autrement dit, pour Maisons du Monde, elle n’avait qu’à uniquement démontrer l’existence d’un « simple risque d’évocation dans l’esprit du public avec le produit imité », ainsi que le détournement de ses investissements.
La Cour de cassation ne l’a pas entendu de cette oreille…
3. La décision de la Cour de cassation
La Cour de Cassation relève que :
– Le tableau « Pub 50’s » commercialisé par la société Maisons du Monde, était composé de différents clichés disponibles en droit libre sur internet. Le tableau ne présentait donc pas une originalité suffisante pour constituer une valeur économique individualisée.
– Les décors des tasses et bols commercialisés ne sont pas des copies serviles de ces clichés.
– Une absence de caractère emblématique de la collection au sens où :
– La toile « Pub 50’s » a été commercialisée sur une période limitée ;
– La toile n’a jamais été mise en avant comme étant emblématique de la collection « vintage » ;
– La société Maison du monde n’était pas la seule à exploiter ;
– La toile n’était pas caractéristique de l’univers des produits de la société Maison du monde ;
– La société a développé d’autres collections.
Au regard de ces éléments, la Cour de cassation considère que la société Maisons du Monde ne justifiait pas d’une « valeur économique identifiée et individualisée » en créant et commercialisant la toile « Pub 50’s ». Elle déboute donc la société Maisons du Monde de ses demandes sur le fondement du parasitisme.
Cette décision amène un regard nouveau à porter sur la notion de parasitisme qui était utilisée comme ultime recours par les praticiens pour poursuivre un concurrent indélicat en l’absence de droit de propriété intellectuelle.
La Cour de cassation rappelle avec cette décision que faute d’avoir un quelconque droit de propriété intellectuelle, il faut néanmoins caractériser l’existence d’une « valeur économique individualisée ».
Conseil de vos avocates préférées : veillez à documenter vos efforts d’innovation et d’investissement ! Cela nous aidera à prouver la valeur économique individualisée de votre création en cas d’acte de parasitisme 😊
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Source: Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 26 juin 2024, 23-13.535, Publié au bulletin